Il fallait la faire une fois (au moins), la « plus longue montée en cabane de Suisse ». Mais qu’il est beau ce Baltschiedertal et qu’il est agréable de marcher l’oreille toute tendue aux récits de John, un peu comme quand j’étais gosse et que ma mère me racontait tout Troie pour me distraire de la longueur de la journée ! Et la plaque de choc Ovomaltine de 200g. que tu peux avoir pour « nur 3 Franken » en traversant le tunnel du Lötschberg n’est pas totalement étrangère à mon envie d’aller faire un tour dans le Haut Valais.
Bon, autant le dire tout de suite, la montée à la Baltschiederklause est tout aussi idyllique qu’elle est longue ! En suivant d’abord les lignes du bisse de Nirwäch dont le tracé est taillé à même la falaise, puis en montant en direction de la face sud du Stockhorn pour finir par découvrir les cirques glaciaires du Baltschieder Gletscher avec ses beaux sommets : Bietschhorn, Jaegihorn, la belle paroi du Gredetschhorn, etc. Et l’arrivée à la cabane qui a su garder son caractère montagnard, l’accueil chaleureux de Yolanda, sont à l’opposé de l’expérience « Mont Blanc » où l’alpiniste est surtout vu comme une vache à lait, voire comme une nuisance nécessaire… Là rien de tout ça, on t’accueille avec la simplicité, la chaleur et la générosité de ceux qui aiment vraiment la montagne !
Le seul désavantage de ce genre de lieux est qu’en dégustant ta tartine de pain maison et confiture maison, tu n’a plus nécessairement envie de quitter la cabane… Heureusement, John est capable de passer en moins de 4 secondes du mode « tartine » au mode « baudrier ». Tellement rapide qu’on négociera pour que le lendemain, je me lève 20 minutes avant lui, histoire d’avoir le temps de végéter un peu dans le calme du réfectoire vide. C’est avec entrain qu’on se dirige vers la base de l’éperon E du Bietschhorn, sur (ou plutôt dans) une neige pas franchement regelée. Il faut dire qu’avec 10°C à 2h du matin, on n’espérait pas grand chose ! Dans ces conditions, on a plus l’impression de monter au Beachhorn et on regrette déjà nos costumes de bain pour la descente de l’arête N qui s’annonce délicate dans cette soupe. On avait tout entendu sur cette montagne, et s’il est vrai que le caillou n’est franchement pas partout bon, cela reste très gérable et même agréable, au vu des difficultés modérées que l’on rencontre à la montée. Pour ce qui est de la descente sur l’arête N, par contre, je pense pouvoir dire en tout état de cause que c’était une mauvaise idée de s’y trouver une journée de canicule : le rocher est bien délité et si le gel ne tient pas le tout ensemble, il faut être très très attentif sans parler de la partie finale en neige, dans laquelle la glace se cache non loin de la surface ! Au final, malgré l’intense concentration demandée par la descente, cette traversée est certainement la plus belle manière de monter sur le Bietschhorn !
Après cette belle journée ponctuée par un retour en brasse-coulée sur un glacier surchauffé, nous rentabilisons la montée à la cabane en gravissant le Jaegihorn par son arête SE. Après les quelques longueurs et couloirs d’approche, on rejoint le fil d’une arête qui surprend par la qualité de son rocher et de son escalade : en grimpant le Biestschhorn, on n’imagine pas une seconde qu’il est possible de trouver sur un sommet si proche un granite d’une telle compacité ! Et cette course présente l’avantage d’éviter les passages en neige, ce qui finira de nous ravir.
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