On en a déjà pas mal parlé sur ce blog, mais qu’à cela ne tienne, il n’est jamais perdu de le répéter une fois de plus : le massif granitique de suisse centrale n’a d’égal à la beauté de son caillou que l’instabilité de sa météo… Mais, malgré ce rappel et les quelques buts météo déjà pris dans la région, lorsque le bulletin annonce un créneau de 4 jours d’anticyclone sur l’ensemble des Alpes, on n’a pas hésité une seconde à y retourner, pour le meilleur et pour le pire :-).
Comme il n’y a pas d’eau au Salbitbiwak sous l’arête W et que j’ai mis un vent à Lucas qui aurait préféré l’intégrale de Peuterey (là où il fait beau…), sous prétexte que je ne me voyais pas grimper toute la Noire avec un sac de 20kg, on se paye une puissante montée en cabane avec des sacs surchargés, 4 jours de nourriture et de la flotte pour en tout cas 2 jours… Juste une manière de démontrer qu’en fait, si on est pas allé à Peuterey, ce n’est pas tant à cause de mon physique de biquette qu’à cause de la trouille que cet itinéraire me refile. Mais bon, comme une fois arrivé à la cabane le temps est au beau fixe salbitchien (avec le soleil bien présent, mais juste loin derrière les nuages) et que le gardien nous évoque, comme en ellipse, les 10cm de neige tombé le jour d’avant, on oublie bien vite ce petit désaccord et après avoir beaucoup hésité à faire la sieste tout l’après-midi, on se lance tout de même à l’assaut de l’arête sud.

Avec tout ce soleil, on en vient à regretter la membrane Gore-Tex absente de nos godasses

Bon, du coup il y a de l’ambiance !

Et on voit même un bout de la sud !
Au programme, une belle escalade qui fait froid au doigts, quelques dalles bien glissantes mais une météo qui s’améliore au fur et à mesure qu’on monte et, surtout, la chance de parcourir cet itinéraire classique sans faire la queue à chaque relais ! Très beau caillou équipement plaisir, vue imprenable (enfin, il paraît que…) : c’est une classique à faire absolument. Et la descente qui a parfois mauvaise réputation n’est en fait pas si terrible, indiquée à la suisse-allemande avec des points rouges tout du long et ça passe en baskets quand il reste 10cm de neige…

Quelque part sur la sud, un rayon perce les nuages.

Partout de très beaux passages de grimpe sur un rocher irréprochable !

Et même la vue sur le tracé de l’arête W !

Le gardien n’avait pas menti…

Et le temps qui se lève, un peu.
Finalement, faire cette sud fut une très bonne idée, puisque le jour suivant de grand beau temps annoncé a ressemblé à ça :

Le grand soleil annoncé !

Alors on s’occupe !
Contre mauvaise fortune on fait volontiers bon estomac avec une dégustation des Roesti au autre Käseschnitte que la cabane propose. Et ça nous permet d’exercer notre portage, puisqu’on a pas perdu l’espoir de grimper quelque chose et qu’on se trimballe en permanence avec nos sacs… L’avantage est qu’on sera de retour tôt au bivouac, histoire de réserver notre place puisque demain c’est samedi et que la liste des prétendants à l’arête W s’allonge au fur et à mesure que le jour décline et que le ciel se nettoie, enfin ! Et l’avantage de faire cette arête W en deux jours c’est qu’on a nul besoin de s’exciter à l’heure du souper pour aller fixer la première longueur ou encore entamer de solides négociations avec les autres cordées pour déterminer la répartition des troupes sur la ligne de départ :-). On partira donc trankilou le samedi matin à 9h, après tout le monde avec le sentiment d’avoir l’arête pour nous tous seuls, géant !
Les longueurs de la tour 1 déroulent bien jusqu’à un dièdre très pur annoncé en 6a gros gag (ou peut-être est-ce le poids du sac) qui a du donné quelques sueurs froides aux grimpeurs adeptes du Schweitz Plaisir qui pensent que, oui, l’arête W est la continuité logique de l’arête S… La tour 2 quand à elle propose le premier vrai challenge avec deux longueurs en fissures raides et continues et pour l’une d’entre elle en gros Offwidth protégé sur vieux coins de bois. Ambiance ! Et Lucas qui, étonné de la grosse frite qu’il a avec ce sac sur le dos, se rend compte qu’il a oublié l’eau pour le repas du soir. Tant pis, il se mordra les doigts d’avoir choisit un lyoph’ Chili Con Carne épicé et on s’endormira la bouche pâteuse au superbe bivouac de la tour 2.

Tour 1, L1

Avant les gradins de la partie peu raide la tour 1

Vue sur la ligne de fissures parfaites de la tour 2

Bivouac avec vue 🙂
Départ frais le deuxième jour, ce n’est pas plus mal, tous ces passages côté obscur de l’arête nous feront oublier la division par deux de nos ressources aquatiques. A tel point qu’on finira même avec du rab… Les longueurs belles se succèdent et chaque tour propose son lot de challenge avec quand même quelques passages bien sous-cotés et notamment une cheminée déversante en 5c qui ne se laisse pas amadouer si facilement… La fin du parcours est particulièrement esthétique avec un itinéraire de plus en plus aérien sur le fil, jusqu’au sommet ! A part la perte d’une godasse d’approche suite à une malencontreuse manipulation de mousqueton, rien à signaler de fâcheux et cela permet à Lucas de me clouer le caquet sur cette histoire de flotte évanescente. La descente depuis le sommet se fait dans une ligne de rappel directe dans la face en direction du bivouac, super efficace et en une heure trente on est de retour au pied de l’arête. Ne reste plus qu’à tester la descente mixte chausson/chaussure jusqu’à la voiture !

Frisquet de bon matin !

5C qui défouraille !

4b qui défouraille aussi…

Summit !

Photo so classic 😉

La fin des rappels

Bonne chance !
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