Comme notre départ pour la Côte Ouest des USA approche, il fallait bien que je me mette à un petit entraînement de ce que nos compères américains maîtrisent si bien : l’escalade en fissures. Et quoi de mieux que le Valle dell’ Orco pour se mettre en jambe (et en poings)? Les marches d’approches réduites à quelques crapahutages dans des pierriers, le soleil dès le matin et surtout le café, les pizzas et la grappa sauront me convaincre de la solidité des points qu’on place soi-même dans le rocher. Parce que si Valentin a déjà bien du métier dans le placement de protections, il n’en va pas de même pour ma part. D’autant plus que ma dernière visite au Valle dell’ Orco ressemblait davantage à une convalescence post opération du genou durant laquelle j’ai davantage manié l’appareil de photos plutôt que les friends.
Qu’à cela ne tienne, Valentin se montre bon instructeur et trouve même des figures pédagogiques qui me parlent afin de me faire comprendre la science du coincement de mains, de poings, de doigts et de pieds. Comme par exemple, l’image du poulpe (les doigts jouant le rôle de l’animal) se débattant dans la fissure : les personnes à l’imagination débordante – et qui se balladent, comme moi, avec un doudou au baudrier – comprendront.
Pour commencer en douceur, Valentin a pensé à une voie toute faite pour moi : la Via Locatelli. Peu soutenue, mais avec quelques passages de belle grimpe, la voie se prête très bien à une première approche de la grimpe du coin.
Pour bien finir la journée, Valentin décide de tenter la magnifique fissure qui figure sur le topo. On va tenter la même photo, mais je dois dire qu’il me manque un peu de gainage et de capacité de blocage pour le « jeté sur coincement de main »…

Bon, on peut bien m’imaginer dans la même posture : un poil plus bronzée, de longs cheveux noirs au vent.
A la place, on vous propose notre interprétation d’Elisir d’Incastro (élixir de coincement pour les non-italophones).

Le coincement, ça demande du biscotto et un poile de maîtrise de la douleur : aïeuuuu, ça fait maaaaal!
Comme Elisir d’Incastro était peut-être un peu trop difficile pour que je me prête à la grimpe en tête (6b+, quand même), je me lance, le lendemain dans une longueur – de coincement, toujours – mythique de la région : Incastromania – la manie du coincement. Vous me direz, au niveau des noms des voies, ils ne se sont pas trop foulés.

Incastromania, les derniers pas et la politique des deux points à 30 cemtimètres d’intervalle, au cas où…
La fissure s’accompagne toujours d’une copine de choix : la dalle. Si les grimpeurs de fissures adorent se coincer dans tous les sens, ils craignent généralement les longueurs de dalle où l’espacement entre les points se fait parfois bien ressentir. Pour exceller dans le style, il fallait avoir suivi des cours dans les années 80. Comme ce n’est pas notre cas, il n’y a qu’une chose à faire : grimper de la dalle encore et encore. Après l’échauffement dans Incastromania, départ dans une combinaison de voies en commençant par la dalle de Paperinik, la fissure à verroux de Nicchia delle Torture (je vous épargne la traduction…) et en finissant par la fissure fine de Cannabis et ses dalles difficiles de fin.
Et comme on a pris pas mal de conti’ en ces mois de grimpe, on enchaîne avec un troisième jour dans une combinaison démocratique issue d’une compromis de couple : le début de Nautilus que je leaderai et la fin de Jedi Master (spéciale dédicace à Numa !) que Valentin prendra en tête.

Sortie ultra athlétique du toit : « que la force soit avec toi »… et un poil de technique aide passablement.
Après ce petit entraînement en basse altitude, je décide d’appliquer les leçons reçues en montagne. Alors fini, pizza, café et grappa, bonjour refuge de l’Envers des Aiguilles de Chamonix. Comme toujours, l’exercice commence par la poya obligée du coin : la montée au Montenvers, les échelles pour atteindre la mer de glace, la marche sur celle-ci et re des échelles pour monter au refuge. Le tout chargés en (beaucoup de) friends portés avec amour par Valentin – il sait que si je fatigue trop vite, je ne voudrai pas grimper l’après-midi de notre arrivée :-). A peine arrivés au refuge, après trois jours de grimpe, voilà que Valentin veut que j’accélère le repas, histoire de commencer rapidement « Le Piège » qui nous occupera l’après-midi (non, mais sérieux, où sont passés les potes de Valentin, j’en peux plus!!!!). Au final, je serai ravie de m’essayer aux fissures granitiques du massif de Chamonix. Deux jours, deux voies et une descente sous la flotte pour le troisième jour.
Le deuxième jour, enthousiasmés par les photos de « California dreams » – le nom présage déjà de fissures d’anthologie – , on décide de tenter notre chance. Marche sur glacier, passage sur pont de neige (j’adore), crapahutage et pente raide pour atteindre le début de la voie. Et là… gros but : la rimaye nous tend les bras, impossible de passer – pas sans envisager un jeté sur falaise. Du coup, désescalade (j’adore aussi) et changement de programme. Vu le monde déjà engagé dans la classique voie « Le Marchand de sable », on s’attaque à sa voisine « Dracula« , sans doute baptisée ainsi pas Michel Piola pour la « vampirisation » qu’elle exerce sur le marchand (la dalle me permet parfois des réflexions inattendues…).
Leave a reply