L’année dernière, j’avais lancé l’idée complètement farfelue de grimper le Petit Clocher du Portalet par Etat de Choc. Carrément pas préparée, j’ai plutôt subi les 200 mètres de grimpe en libérant ce qui était possible et en artifant le reste. Entre temps, on s’est offert trois mois de stage aux Etats-Unis et une solide école de fissure. Ma lubie, pour cette année, c’était donc de grimper le Grand Capucin.
Quand tu débutes la grimpe et la montagne, une des premières choses que tu fais, c’est d’essayer de devenir un grimpeur, un vrai. Et quand j’écris cela, ce n’est pas tant d’améliorer ses performances techniques et physiques, mais plutôt d’adhérer au groupe en adoptant ses traits culturels – les études d’anthropologie, ça te marque à jamais.
Pour ce faire, tu commences par t’acheter les mêmes pantalons que tout le monde – une certaines marque italienne qu’on ne citera pas -, tu arbores des t-shirts de geek avec des inscriptions que seuls des grimpeurs peuvent comprendre et quand il pleut, tu mates des films de grimpe et de montagne histoire de pouvoir suivre les conversations avec tes potes grimpeurs le samedi soir d’un week-end maussade.
Bref, il y a quelques années en arrière, j’ai regardé un de ces beaux films de montagne, Au-delà des cimes, où Catherine Destivelle grimpe une des voies royales du Grand Capucin sous les caméras de Rémy Tézier. Et comme ils avaient les moyens, les plans sont pris par hélico ou via des caméras fixées dans la montagne. Du coup, la jeune pucelle que j’étais, en a pris plein les mirettes et s’était juré qu’elle aussi, un jour, gravirait le Grand Cap’.
Après, il faut noter que la paroi fait quand même 400m., que les longueurs ne sont quasiment pas équipées et que j’ai franchement pas vraiment le niveau pour passer en tête. Là, généralement, je prends ces yeux-là et je demande gentiment à Valentin s’il n’aurait pas envie de s’enquiller 16 longueurs de trad en tête pour m’emmener là-haut :-).
Comme l’amour est le moteur de l’humanité (rien qu’ça), Val n’a pas longtemps résisté à mes doux chants et c’est donc par les trois premières longueurs d’Elixir d’Astaroth qu’on rejoindra la fameuse voie grimpée par Catherine Destivelle, Voyage selon Gulliver, une ouverture signée Piola et Vogler. Comme Valentin est un grand romantique – et qu’il déteste dormir dans des refuges bondés – , il s’acquittera du portage de tout le matériel pour camper dans la combe maudite loin de la foule, en amoureux . A ces altitudes, l’amour se donne emmitouflé dans sa sous-couche thermiques et chacun dans son sac de couchage… On est d’accord, c’est pas l’île de la tentation, mais l’intention y est !

Service 5 étoiles. En plus de grimper toutes les longueurs en tête, Val porte tout le camping : la grande classe !
Après deux heures d’attente pour prendre le téléphérique pour l’Aiguille du Midi, deux poses photos pour des touristes indiens qui te prennent pour des guerriers et une petite heure de marche en descente où tu te dis que, heureusement, tu portes pas tout ça à la montée, nous voilà enfin arrivés au camp de base.
Le reste, c’est l’histoire de la plus belle grimpe sur granite qui nous a été donnée d’escalader. A n’en pas douter, la porte d’entrée de Voyage par les trois premières longueurs d’Elixir en fait une grimpe longue et soutenue, mais vraiment incroyable et je pèse mes mots. Le stage fissure aux Etats-Unis m’a permis d’enchaîner la plupart des longueurs en prenant un plaisir fou à dérouler de manière complètement logique ces longueurs de fissures et de dalles sur un granite parfait. Le plus beau cadeau d’anniversaire jamais reçu : un grand merci à mon Valentin !
Comme les créneaux météos stables sur plusieurs jours sont rares en montagne, on ne pouvait pas partir de la Combe Maudite, sans une dernière petite grimpe. Le grand voyage nous aura bien cassés, mais bon, quand on aime, on fait fi des courbatures ! Pour la cuvée du deuxième jour, on choisira un combo de deux belles lignes, la Tabou – Bonatti pour aller au sommet de la Chandelle du Tacul. Le topo annonçait des cotations jusqu’à 6b+ seulement et la plus belle 5c du massif. Bin on l’a bien roté… On s’est d’ailleurs demandé s’ils n’avaient pas confondu les adjectifs « beau » et « dur » lorsqu’ils parlaient de cette fameuse longueur en 5c.
Flo.
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